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VITDITS ET AGLAMIETTES
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Vous venez d'atterrir sur le blog d'AGLAMIETTES où sévissent Aglaé, Thomas et Dan.

Chez nous, vous trouverez des textes courts, des aphorismes pas toujours très sérieux, des réparties dites VD, ou « Vitdit » pas vraiment classiques, mais, autant que possible humoristiques.

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vitdits-ecran

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A bientôt !

6 août 2013

Histoire d'un vêtement...

 

veste-grise

 

 

Histoire d'un vêtement pour femme qui cherche l'amour

 

chemisier-blanc

Moi, je suis arrivé avec les autres modèles dans un grand carton. Les vendeuses du magasin, plutôt jolies, nous ont déballés et triés tour à tour. J’étais dans la catégorie « vêtement pour femme ». Après m’avoir regardé sous tous les angles, les vendeuses m’ont trouvé tendance, et elles ont décidé que je serai en vitrine.

Je me suis donc retrouvé exposé en première ligne, pleine vue sur l’avenue. J’en ai vu défiler, des passants et des passantes, sur cette même avenue. Les passantes quelquefois s’attardaient sur nous, et parfois même sur moi. Elles me regardaient en plissant les yeux, avec un air intéressé. Certaines fois, elles entraient dans le magasin pour me voir de plus près. Elles m’observaient de face, de dos, me tâtaient entre leurs doigts. Les vendeuses, toujours souriantes, venaient les voir et vantaient mes mérites, comme quoi j’étais de la nouvelle collection et tout et tout… Ça les branchait plutôt.
Alors, une première fois, on m’a essayé. Bizarre cette première fois, pas du tout comme je l’aurais cru ; il paraît que ça fait toujours ça. Elle m’avait déjà bien tâté de partout. Elle m’a enroulé autour de son bras et nous sommes allés dans la cabine d’essayage. Nous n’étions plus que les deux dans cette pièce étroite, et j’ai trouvé ça drôlement intime. Et puis elle a enlevé ses vêtements, là comme ça, devant moi. J’étais scié. Jamais j’aurais pu penser que ça ressemblait à ça un corps de femme. J’étais pas encore remis qu’elle m’a enfilé sans prévenir. Je ne savais plus du tout quoi faire. J’étais tout de travers, pas bien posé sur elle. Elle nous a regardés dans le miroir, nous deux ensemble, visiblement déçue. Elle m’a enlevé et quitté la cabine. J’étais encore soufflé. Elle a dit aux vendeuses que non finalement. Les vendeuses, rassurantes, ont répondu que ce n’était pas grave. Après, heureusement, il y en eut d’autres, des belles et des moins belles. J’en ai vu entre mes deux manches. Moi je faisais tout ce que je pouvais. Entre-temps, je m’étais amélioré. À chaque fois, dans la cabine, je me pliais en quatre. J’essayais de leur faire le ventre plus plat, la poitrine plus ferme, je me faisais le plus doux et agréable sur leur peau.
Je leur murmurais « je t’aime » dans un souffle. J’avais l’espoir qu’un jour l’une d’elles veuille me garder. Car dans le fond je les enviais, les autres, quand ils s’en allaient par la porte du magasin avec leur destinée. Ils disparaissaient dans l’univers inconnu, ils partaient pour la grande aventure. Moi aussi, je voulais la vivre, la vie à deux. Au lieu de ça, elles m’ont toutes jeté une à une. Certaines étaient douces : elles me repliaient soigneusement, me rapportaient aux vendeuses en expliquant qu’elles m’aimaient bien, mais que voilà, ça n’irait pas plus loin. Ça m’allait encore bien. Mais d’autres étaient bien plus cruelles. Elles me laissaient tout seul dans la cabine, pendu comme une loque au crochet. Alors je voyais se déshabiller devant moi n’importe quoi, même des vieux ; et je devais attendre la fin de la journée que les vendeuses me ramassent. Des fois aussi, elles me reposaient n’importe où dans le magasin, où ça les arrangeaient, et je me retrouvais mal accompagné, au milieu des pantalons ou pire, des sous-vêtements.

chemisier-noir

Je ne les choisissais pas, moi, toutes ces femmes avec qui j’étais intime, un moment. Il y en a que je préférais, d’autres que je préférais moins, mais toutes je les ai aimées, au moins un peu. Et même les pires. Même celle-là qui a dit aux vendeuses que oui, mais que simplement elle n’avait pas l’argent sur elle, et que donc elle repasserait bientôt, et qui n’est jamais revenue. Même cette autre qui m’avait laissé par terre puis marché dessus comme une serpillière ; j’ai dû attendre les vendeuses qui m’ont retrouvé au soir, tout poussiéreux et froissé au sol. Elles avaient été bien gentilles, et un peu tristes sur mon sort. J’étais devenu un cas à part sur lequel elles délibéraient :

- C’est quand même bizarre, il est pas mal ce truc-là, elles répétaient. Tu le prendrais pas pour toi ?
- Pour moi ? Non, il m’ira pas, c’est sûr. Et puis j’en ai déjà vu tellement l’enfiler ce truc-là…

Elles n’avaient pas tort. J’avais perdu de ma superbe avec tous ces essais. À force, j’étais cabossé, mes fibres plus si souples, ma coupe moins sûre, ma couleur moins belle. Et puis dans le fond j’étais un peu dégoûté par tout ça, un peu lassé de toutes ces femmes.

Et puis il y eut elle.
Dès que son regard s’est posé sur moi, j’ai su que ce serait différent. Elle aussi m’a aimé du premier regard. Nous sommes allés ensemble à la cabine. Je m’enroulais précisément sur ses formes, j’étais parfait, comme sur mesure. Sa peau était douce, sucrée. Nous nous sommes regardés dans le miroir. Comme nous étions beaux ! Ça a duré quelques minutes. J’ai regardé dans ses yeux et j’ai bien vu qu’elle était amoureuse, ça brillait dans ses prunelles. J’ai pensé à nous deux, comment ça serait. Je serai là, privilégié dans sa garde-robe. Elle me choisira et je la suivrai, je la servirai, je ne la lâcherai pas. En retour, elle saura prendre soin de moi. J’irai faire un tour dans sa machine et je sentirai bon la lavande. Elle me fera sécher, agréablement traversé par un courant d’air frais. Puis pour me réchauffer elle me repassera amoureusement, et je serai comme neuf, de nouveau prêt à tout. Nous sommes allés faire la queue.
Malheureusement, ce coup-là, il y avait long d’attente. Tant pis je me suis dit, il en restait du temps pour nous deux. Et puis je l’ai vu commencer à faire les yeux doux, ce saligaud de petit haut cachemire. Il était sur le chemin, bien mis en valeur, et il reluquait mon amour. J’osais à peine y croire. Et le pire, c’est qu’elle s’est mise à s’intéresser à lui ! J’étais jaloux à en crever. Je l’aurais bien mis en pièce. Non de toute façon, je me suis dit, elle ne me lâchera pas pour un vaurien pareil.

Fatalement, nous sommes arrivés à son niveau. Et voilà qu’elle a commencé à le faire passer entre ses doigts. Il aimait ça le salaud. Après l’avoir bien tripoté, elle nous a comparés tous les deux, chacun dans une main. J’en menais pas large. J’essayais de lui rappeler nos souvenirs, comme nous étions beaux tous les deux dans la cabine, comme nous étions si bien assortis. Mais rien n’a suffi. Elle m’a reposé sur le côté et est partie avec le petit haut cachemire. Je les haïssais tous les deux. À partir de ce moment-là, je n’ai plus fait aucun effort. Je faisais la gueule, j’étais un vrai repoussoir, je me tenais mal, je ne donnais plus envie à personne. Les vendeuses en avaient marre de me voir dans cet état-là. Peu à peu, elles se sont mises à causer d’un événement spécial, qui approchait à grands pas. Elles s’affairaient, elles étaient tendues un peu plus chaque jour. Moi je serais bradé, elles avaient décrété. Moins 40% dès la première démarque.
Je partirai, cette fois, c’était sûr elles disaient. J’ai repris espoir.

Le grand jour est arrivé. Dès le petit matin, j’ai vu une cohorte de louves sauvages s’agglutiner devant les portes du magasin. Parmi elles, il y en avait deux surtout qui me dévoraient des yeux. Une blonde avec un manteau vert et une brune avec un manteau bleu. Je les ai reconnues toutes les deux ; elles m’étaient déjà passées dessus. Sans plus, je saurais plus bien dire, elles n’avaient pas l’air décidées sur le moment. C’était peut-être ce que les vendeuses appelaient le repérage. En tout cas, mon étiquette « moins 40% » les avait rendues cette fois dingues de moi. À huit heures pile, les vendeuses ont ouvert les portes.
Les louves ont pris d’assaut le magasin, hystériques et affamées. La brune et la blonde n’ont pas traîné et sont arrivées de suite. La première m’a saisi par la manche gauche, la seconde par la droite, et toutes les deux se sont mises à tirer en se disputant. Moi, au milieu, j’étais mal, de plus en plus écartelé, contorsionné, tiraillé par ces deux démentes. Et puis ce qui devait arriver arriva. Je me suis ouvert de plusieurs centimètres sur le flanc gauche. Le deux folles se sont regardées farouchement et m’ont laissé tomber avant de repartir en furie.

Ce sont les vendeuses qui m’ont retrouvé, au soir. Elles ont dit que j’étais définitivement fichu, plus bon à rien. Elles ont rajouté que c’était du gâchis, que c’était bien dommage, et qu’elles en avaient déjà marre de ces hystériques. Elles m’ont jeté en boule dans la poubelle.


Soruf

 

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Commentaires
S
J'aime !!!<br /> <br /> <br /> <br /> La vie - d'un vêtement - n'est PAS un long fleuve tranquille :-)<br /> <br /> <br /> <br /> RV
Répondre
A
je trouve ce texte adorable!!!<br /> <br /> <br /> <br /> Merci chef pour la mise en page particulièrement belle et c'était important étant donné le sujet....tout compris toi...
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