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VITDITS ET AGLAMIETTES
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Vous venez d'atterrir sur le blog d'AGLAMIETTES où sévissent Aglaé, Thomas et Dan.

Chez nous, vous trouverez des textes courts, des aphorismes pas toujours très sérieux, des réparties dites VD, ou « Vitdit » pas vraiment classiques, mais, autant que possible humoristiques.

Laissez-nous un commentaire si vous avez le temps et l'envie.

Les commentaires sont accessibles sous chaque post de nos auteurs.

Une réponse vous sera adressée (sauf caprices de l'informatique toujours possible) !

vitdits-ecran

Participez sous la rubrique : « Le Plumard » réservée à nos amis et invités.

A bientôt !

18 décembre 2013

Félicien Marceau....première partie d'une nouvelle....la suite demain...

felicien_marceau

Félicien Marceau

- Nouvelles -

 

 

Les Ingénus

 

 

Elle (la femme)

- Non ! Je te jure ! Dit-elle.

Sa voix d'enfant. Cette voix de petite fille dans ce grand corps, dans ce grand visage. Cette voix  bête. Cette voix niaise. Face à la mer, sa voix était comme une offense.

Nous étions assis sur un banc de ciment. À côté d'elle, son transistor, minuscule, noir a filets dorés. Fermé, heureusement. Cela avait été mon premier soin. Un geste pour lui caresser la main et hop! ! Dans le prolongement, le transistor tari. Il faut avoir quelques principes fermes. Ils vous aident à tenir debout. Un des miens est de ne jamais passer à côté d'un transistor sans injurier son propriétaire. Elle, je m'y apprêtait. Elle montait un sentier qui était au dessous de moi, un sentier raide, en lacet, bordé d'agaves, de lentisques. D'au dessus, comme j'étais, je ne voyais pas son visage. Je m'étais arrêté là, un moment, pour regarder la mer. Elle était, ce jour-là, parfaitement plate, unie, à peine quelques frissons et, au large de longues traînées lisses  et brillantes. Comme une glu cette mer. Ou comme une gangue. Les rochers avaient l'air de s'y être pris les pattes - ou de n'être que posés dessus comme sur un miroir. Elle (la femme) continuait à monter entre les agaves, sa musique autour d'elle. Sa musique bête. Comme une cuillère qu'on aurait tournée dans le paysage. Ces transistors, on dirait qu'ils ont des programmes à eux, qu' on entend nulle part ailleurs. Un moment, dans le dernier tournant, je l'ai vue de dos… Elle était en vert. Chemisier et pantalon vert. Vert tilleul. Le chemisier avait des dessins, le pantalon uni. Puis elle est arrivée à ma hauteur, je me suis retourné. Les deux coudes derrière moi, sur le mur bas, j'allais m'en prendre à son transistor lorsque, brusquement quelque chose comme une idée, comme un souvenir m'a effleuré. Elle s'est arrêtée. Elle a retiré ses lunettes  noires - une monture incroyable, en forme d'ailes de papillons. Elle a souri. J'ai reconnu ses deux dents de devant, très écartés. Au moment où j'allais dire : c'est toi…

- C'est toi ? Avait-elle dit

A la voir, avec son grand visage, ses épaules larges, on se serait attendu à une belle voix de gorge, ou alors la voix rauque de la chanteuse réaliste. Il sortait seulement ce mince filet qui avait l'air de dire : oh, je vais appeler mon papa. « C'est toi ? » Elle avait dit en hésitant mais sans étonnement. Je cherchais son prénom. Je ne le retrouvais pas. Alors j'ai caressé sa main (et hop, le transistor) : je t'ai emmenée près de ce banc. Un banc de ciment, grenu, râpeux, mis là pour les touristes, en raison de la vue. Nous nous sommes assis et là, immédiatement, elle s'est mise à me parler. Un peu parler comme si nous nous étions quittés la veille, comme si elle parlait toute seule. Je ne l'écoutais qu'à moitié. La mer, le soleil, je venais de nager pendant deux heures, j'avais la tête vite.

- Non, dit-elle. Je n'appelle pas ça vivre.

Je voulais ici ne parler que d'elle. Pour la clarté de mon récit. Je vois bien qu'il me faut dire aussi un mot de moi. J'étais déjà venu dans cette ville mais il y avait quoi ? 20 ans ? Plus encore ? L'avant-veille mon départ, pour rendre les politesses de l'été j'ai, j'avais invité quelques personnalités, dans un restaurant. Un restaurant dit pittoresque, dans une ruelle voutées, les murs passés à la chaux, des filets de pêche, des casiers à langoustes. Le tout sous un éclairage au néon, funèbre. Il n'y avait que peu de clients. Enfin, il me semble. Dans mon souvenir  je vois une longue salle où trois tables tanguaient comme des épaves. Il y avait bien un guitariste. L'œil éteint, la joue creuse, une mèche à l'artiste mais charbonneuse. Il avait l'air de porter sa guitare en terre. À une autre de ces tables, il y avait une femme, avec deux hommes. Rousse, d'un roux éclatant, et un chemisier rouge qui, lui aussi, se voyait. La joue  sur la main, le coude sur la table, elle écoutait ce que se racontaient  les deux hommes. Puis, par-dessus sa main, paresseusement, son regard a fait le tour de la salle. Il s'est arrêté sur moi. Je la regardais aussi. Un moment, nous avons été seuls. Seuls au monde. Seuls dans notre île. Puis ma voisine m'a dit quelque chose. J'ai dû répondre. Le guitariste s'est mis à chanter : l'amour est un bouquet de violettes. En juger par son expression, ces violettes n'arrangeaient rien.

Les deux hommes étaient quelconques, plus très jeunes. L'un avait une tête de rat, l'autre un beau profil romain, mais leur regard désert, comme un buste. Et il tenait sa tête comme un buste aussi, très droite. C'était l'homme à la tête de rat qui parlait. L'autre, visiblement se donnait un mal fou pour avoir l'air de comprendre, de partager les points de vue, hochant la tête, plissant le nez, battant des paupières. Le guitariste arrivait au bout de ses violettes. Il a pris une assiette. La femme en rouge s'est levée.

- Donne. C'est moi qui vais  faire la quête.

De sa voix d'enfant, dans ce restaurant où tout avait l'air d'avoir été rassemblé au hasard, les murs, les gens, les paniers à langoustes, brusquement on eut dit que les choses et les gens enfin s'ordonnaient, prenaient un sens. La vie. La vie passait entre les tables. Le guitariste avait repris ses violettes mais sur un rythme le plus vif et comme si, d'un moment à l'autre, ces violettes, c'était devenu quelque chose de merveilleux. Et elle avançait en dansant mais à moitié, les mouvements à peine esquissés, comme un élan mais coupé, contenu, comme une danse à l'intérieur d'elle-même et dont n'apparaissait que le frémissement. Elle avait commencé par une autre table. L'homme devait n'avoir préparé qu'une pièce. Devant cette grande fille, il se troublait, cherchait dans ses poches. Sa femme désapprouvait, détournait la tête. Puis elle est venue vers nous. Toujours en dansant à moitié, comme bercée plutôt, un genou plié, une main tenant l'assiette. L'autre bras à  demi levé.

- Pour la musique…

 

 

... à suivre...

 

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Commentaires
A
Merci Chef pour la belle page!...c'est important avec un bon texte!<br /> <br /> <br /> <br /> Demain si j'ai le courage la deuxième partie...l'aglaphone fait qqs fautes mais tout le monde me pardonne, j'espère?
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