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VITDITS ET AGLAMIETTES
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Vous venez d'atterrir sur le blog d'AGLAMIETTES où sévissent Aglaé, Thomas et Dan.

Chez nous, vous trouverez des textes courts, des aphorismes pas toujours très sérieux, des réparties dites VD, ou « Vitdit » pas vraiment classiques, mais, autant que possible humoristiques.

Laissez-nous un commentaire si vous avez le temps et l'envie.

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vitdits-ecran

Participez sous la rubrique : « Le Plumard » réservée à nos amis et invités.

A bientôt !

5 juin 2012

Un souvenir d'Aglaé pour Clara qui commence une carrière de comédienne...

moutonfoto1

foto volée à Rémy pendant qu'il a le dos tourné...

 

 

Une première fois au théâtre

 

La mère de mon père, on l’appelait mémère, diminutif un peu ridicule aujourd’hui ; c’était plus une grand-mère lecture qu’une grand-mère confiture. Elle m‘avait déjà traînée dans des endroits singuliers, où des dames un peu excentriques déclamaient des vers, miaulaient des barcarolles ou raclaient des violons avec une volonté manifeste de charmer un auditoire acquis à l’avance. C’est vous dire que j’attendais à peu près n’importe quoi des initiatives artistiques de mémère. En plus, elle se maquillait un peu lourdement et elle parlait fort dans le métro. L’accompagner comportait un sens inné du sacrifice pour une fillette de douze ans qui venait d’entrer en sixième.

 

Quand, un jeudi de décembre, elle m’annonça en souriant que nous allions au théâtre, je m’attendais plutôt à une curiosité folklorique. Pas du tout. Elle avait bel et bien deux places pour aller voir à la Comédie Française, en matinée, « Le Malade Imaginaire ». A cet âge-là, j’ignorais tout du théâtre, à part une écoute clandestine de « La Petite Hutte «  d’André Roussin , à la radio, qui m’avait fait tordre de rire. Il faut dire que le trio, vieux comme le monde, de la femme, du mari et de l’amant, était aussi neuf pour moi qu’un champignon dans la rosée du matin.

 

Mes souvenirs d’arrivée au théâtre se sont fondus en un seul . Tout est rouge et or , moquetté richement, si bien que les spectateurs s’écoulent comme une foule silencieuse…l’éclairage est doré, puissant et doux à la fois…une sonnerie grêle et entêtée rameute les retardataires…le ton des conversations s’abaissent ; les trois coups sonores du brigadier me tassent définitivement dans une immobilité attentive et respectueuse. Les derniers murmures se taisent.

 

L’enroulement du rideau rouge n’en finit pas. Je découvre, en même temps que le décor d’une vaste pièce assez vieillotte, un comédien assis dans un fauteuil, son corps maigre enfoui dans une robe de chambre sans élégance, une plume d’oie dans la main droite, une feuille de papier posée devant lui sur un écritoire. Il monologue :

 

-« Trois et deux font cinq, et cinq font dix, et dix font vingt… »

« Plus un petit clystère insinuatif, préparatif et rémollient pour amollir, humecter, et rafraîchir les entrailles de Monsieur… »

« Les entrailles de Monsieur …trente sols… »

 

J’ignore tout de la pièce de Molière, et je ne connais pas le célèbre comédien qui tient le rôle d’Argan ce soir-là et qui s’appelle Denis D’Inès. Mais je pige tout de suite la drôlerie du texte, la liste interminable des soins et des médicaments prodigués à ce faux malade qui déchiffre le montant des honoraires de son médecin en protestant contre les tarifs exorbitants du praticien.

 

-« Ah ! Monsieur Fleurant, tout doux, s’il vous plaît, si vous en usez comme ça, on ne voudra plus être malade ! »

 

A la fin du monologue Argan appelle sa servante en criant et en agitant une petite cloche : « drelin, drelin, drelin, drelin, ils sont sourds ! »…. »Toi-nette, drelin, drelin, drelin, Toi-nette »… »Mon Dieu, ils me laisseront ici mourir, drelin, drelin, drelin, chienne, coquine, drelin, drelin, j’enrage… » ma citation n’est sans doute pas exacte, mais j’ai tant de plaisir à m’en souvenir.

 

Je suis là, fondue dans le bonheur collectif, palpable, d’un public recueilli. Nous ne faisons plus qu’un, savourant le texte, suspendu aux finesses de la langue. Riant ensemble, applaudissant à tout rompre, dévorant des yeux les grands comédiens venus saluer le jeune public du jeudi comme ils le feraient pour un parterre de notables. Ces deux heures de bonheur absolu, je ne sais pas encore, en sortant silencieusement de la grande maison de Molière, qu’elles sont inoubliables comme un rendez-vous amoureux. Normal. Elles sont un rendez-vous amoureux.

 

Quand mes enfants ont eu à leur tour l’âge d’aller au théâtre, nous les avons emmenés voir «  Le Bourgeois Gentilhomme » . Cette fois, je connaissais bien la pièce et le nom des acteurs. C’était sans importance. Je ne regardais pas la scène. Je regardais mes enfants et je pensais à mes douze ans.

 

Aglaé

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Commentaires
A
...que c'était plutôt encourageant pour Clara de constater la force et la longévité de ce premier souvenir...les comédiens ont un rôle immense dans certaines vies et certainement dans la mienne...bon vent à elle!
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I
Merci Aglaé<br /> <br /> <br /> <br /> je vais lui transmettre<br /> <br /> <br /> <br /> bon, avec ta vitesse habituelle tu anticipes un peu le commencement d'une carrière, pour le moment ce sont des travaux d'étudiant :-)<br /> <br /> <br /> <br /> bise<br /> <br /> isa
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A
...si ce texte figure dans le Jyfoutou...
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