Ludovic Kaspar...
You're gone
Mon Amour a levé l'ancre. Petit port rouge de Martini.Nuit blanche on the rocks sur les docks plantés de grues,de citronniers.Des voiles gonflent mes paupières fermées. Je rampe debout.
J'imagine cet Amour croisant déjà au large des poissons-lunes sous un ciel étoilé de Boings,au reflet de cargos sombres.Mon Amour tu t'affales sur un banc d'exocets barbares et affamés qui migrent au ressac de mon absence. Ex-it.
Mes yeux s'y baignent par la force des choses.L'ouvreur de nuit surveille avec ses chiens muselés de près.Il nage, mon regard, suivant cette ronde silencieusement vociférante; je gratte des phrases vives avec mes ongles sur les boutons qui démangent mes paumes en tétanie. Quelle litanie...
Où va mon Amour? Je l'aurais bien donné à bouffer aux requins, moi, cet Amour. Et son coeur avec! Pour lui apprendre à vivre. Et puis mes jambes en même temps pour qu'elles ne souffrent plus, parce qu'elles n'ont plus de pieds ces grandes malheureuses,tellement elles ont mal, rien que deux plaques de chairs qui leur restent à la pace sous les chevilles, larges comme mes deux mains, et suintantes, à vf, avec de grandes dégoulinures de pus qui leur coulent jusqu'aux ongles. Mais où vas-tu?
Tous CES MOTS marmonnés jusqu'à vomir. « Déguerpissez, putains de mots d'amour! » Perché au bord du quai bras vaincus jetant mes écritures malingres parmi les restes des poissons du dernier marché, déchiquetés par les chats qui errent guidés par la faim. Ne plus jamais retourner en ville boire de la bière dans des bars.
Une étoile file, c'est un vieux voeu informulé. Que je ne tiendrai pas cette fois non plus.
Et pour relever la sauce je me retiens de sauter dans l'huile noire.
Mes oublis partent à l'eau dans une bouteille de SOS. Je pleure comme ce marsouin d'eau douce avalé par une baleine qui a fait la une de tous les journaux en 1957.
Ludovic Kaspar