LUdo...Texte de 2006 retrouvé dans les oubliettes de Francopolis...
J’ai viré à coup de pied au cul le mot assis à sa place là dans mon crâne il y a plus de 6 heures – qu’on me donne un synonyme de crâne qui marque plus les esprits comme le bétail, au fer rouge – Il portait un message soi-disant. N’a pas voulu régler son addition au final.
« Sers-moi un verre vide » il a fait insinuant qu’il sortirait pas un sou de son porte sens bourré de billets, ça boursouflait les vérités volées, son machin en fausse peau de crotale… insensé. Vers 14h j’ai posé son verre d’air sous le bock d’un Kleenex sorti de sa boîte depuis avant hier et qui traînait derrière sur la planche d’inox où on fabrique les sandwiches du midi, en dessous de l’horloge. Me suis pas préoccupé des tenants abrutissants. De manière générale si on fout pas le boxon dans mon rade, j’accepte d’installer l’incongru au comptoir et lui file un jeton pour qu’il pisse l’absurde dans les chiottes réservées à la clientèle.
Incongru, absurde, vessies, lanternes. Le temps passe, torchons pressions, vaisselle expresso ; mes gestes se répètent autant que mes paroles « Adieu à tout à l’heure ; Salut n’y reviens pas ». On me la fait pas, je sais mon boulot et reconnais mes hommes d’une lente ouverture de paupière, refermée vite... J’ai eu le temps d’y réfléchir depuis ma première pression remplie nickel faux col au niveau du trait doseur. Un autre job m’aurait convenu mais celui-là aussi. Alors ça aussi valait autant qu’autre chose. Je réfléchissais pas encore des masses, à l’époque. On commence à réfléchir quand on prend ses marques sur son territoire d’action ; sur la carte de cheminement les pointillés définissent plus ou moins les limites de votre département. Votre région. Votre pays. Votre monde. Là où vous êtes ou n’avez rien à faire. C’est ce que je pensais.
Quand au bout de six heures ce mot affalé dans mon crâne m’a fait signe pour commander une tasse de café vide m’annonçant qu’il ne la boirait que si je la lui payais ainsi que son verre d’air. J’ai su que j’allais arrêter de penser définitivement. A quarante ans. Après avoir filé un coup de pied à un mot dont j’ai oublié le nom. La définition.
Ludovic Kaspar