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VITDITS ET AGLAMIETTES
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Vous venez d'atterrir sur le blog d'AGLAMIETTES où sévissent Aglaé, Thomas et Dan.

Chez nous, vous trouverez des textes courts, des aphorismes pas toujours très sérieux, des réparties dites VD, ou « Vitdit » pas vraiment classiques, mais, autant que possible humoristiques.

Laissez-nous un commentaire si vous avez le temps et l'envie.

Les commentaires sont accessibles sous chaque post de nos auteurs.

Une réponse vous sera adressée (sauf caprices de l'informatique toujours possible) !

vitdits-ecran

Participez sous la rubrique : « Le Plumard » réservée à nos amis et invités.

A bientôt !

28 mars 2011

'La Gardienne'...Hervé Baudouy...

 

 

 

 

 

 

 

 

forgetmenotLa Gardienne

Anouk se tenait devant l'évier de la cuisine, et pelait les oeufs pour la salade préférée de Michel. Une brise légère se frayait un chemin à travers les rideaux, et portait cette odeur douce annonçant la pluie.

- C'est bien. Les champs ont besoin d'eau.

Elle sentit les coins de sa bouche dessiner un sourire : elle avait pensé à haute voix. Encore. Cela lui arrivait souvent... Peut-être pour peupler le silence ? ...

Elle vit son reflet dans la vitre, et passa une main décolorée par l'âge dans ses cheveux grisonnants. Ses yeux se fixèrent sur un coquillage posé sur le rebord de la fenêtre. Elle oublia les oeufs...

Son esprit se mit à flotter dans la brise du temps ; les années firent machine arrière à la vitesse du souvenir... Jusqu'au jour où Michel lui avait offert une surprise fabuleuse : une journée au bord de la mer, sans même s'éloigner de la ville !...

 

***

 

Ils s'étaient rencontrés à la vieille papeterie où ils travaillaient tous les deux. Anouk avait travaillé pendant la guerre, comme des milliers de femmes : les hommes étaient loin.

Après avoir quitté l'armée, Michel était revenu pour aider sa mère, veuve et seule, à s'occuper de la ferme familiale. Il travaillait à la papeterie pendant la semaine, pour arrondir les fins de mois.

Anouk se dirigeait ce soir-là vers l'arrêt d'autobus, quand elle marcha sur une boule de chewing-gum. Elle tenta de décoller la gomme, tout en gardant son équilibre ; elle ne réalisa qu'elle avait un public que lorsque Michel apparut à ses côtés :

- Je vais vous aider...

- Merci, c'est très...

Les mots se figèrent dans sa gorge quand elle vit les yeux, des yeux verts comme la mer, profonds comme un vertige ; des yeux qui l'attiraient...

Elle se perdit en lui à cet instant précis.

- J'ai eu peur que vous tombiez ...

Il détacha la gomme avec un mouchoir.

 

Elle était incapable de parler; elle se contentait de fixer ces grands yeux magnétiques, deux océans de mystère...

- Eh bien, voyons un peu ; vous ne ressemblez pas à une Marie-Chantal, ni à une Zabeth... Dois-je continuer à deviner, ou...

- Anouk... Je m'appelle Anouk, parvint-elle à murmurer, d'une voix tellement rauque que ça la fit rougir...

- Un joli nom, pour une jolie fille ! Je sais que nous venons juste de nous rencontrer, mais ce serait un privilège pour moi que de vous raccompagner chez vous...

 

C'est ainsi que tout avait commencé. Ils devinrent inséparables ; ils sortaient ensemble le soir; pendant le week-end, ils travaillaient à la ferme. Ils ressentaient instinctivement le bonheur ou la tristesse de l'autre.

Michel connaissait la fascination d'Anouk pour la mer, même si elle n'y était jamais allée.

Elle collectionnait les coquillages depuis des années ; elle les trouvait aussi bien dans des boutiques de cadeaux que sur des marchés aux puces. Passe-temps naïf et obstiné, dont il se moquait gentiment. Il l'appelait sa "petite sirène perdue".

Ils se voyaient depuis environ trois mois quand Michel lui annonça une surprise, un dimanche matin.

- Je te ramène chez toi pour que tu puisses te changer.

Je reviens te chercher dans une heure, ordonna-t-il avec un sourire.

- Où allons-nous?

- Surprise ! Habille-toi décontracté, d'accord ?

 

Alors qu'elle montait les escaliers, elle détaillait toutes les possibilités : pourquoi avait-il besoin d'une heure ? La ferme n'était pas si loin. S'habiller décontracté ? A quel point?

Iraient-ils au pique-nique annuel du quartier, au cinéma, au parc ? Pourquoi ce secret ?

Elle passait d'une éventualité à l'autre, modifiant son habillement en conséquence...

Elle ne trouvait rien, et cela l'énervait. Elle détestait les surprises, voulant toujours savoir le pourquoi du comment, et où se trouvait chaque chose dans sa vie. Mais, depuis qu'elle avait rencontré Michel, elle allait de surprises en surprise : sa gentillesse, sa douceur et, elle devait bien l'admettre, sa virilité...

 

Elle vit arriver la vieille camionnette alors qu'elle enfilait ses sandales.

Elle vola en bas des marches, passa la porte en coup de vent et le rencontra en boulet de canon sur le perron.

- Ho ! Doucement ! Il y a le feu ? Il souriait de voir son excitation.

Quand il lui ouvrit la portière, elle remarqua qu'il y avait quelque chose sous une bâche, sur le plateau arrière.

- Qu'y a-t-il là-dessous ? Où allons-nous ? C'est loin ? Ma tenue, ça va?

Michel se pencha et, d'un baiser, arrêta les questions.

- Tu es très belle ! Plus de questions pour l'instant. Allons-y.

 

Ils arrivèrent bientôt à la rivière, à ce coude qui avait longtemps servi de baignade. C'était maintenant ensablé, et les baigneurs avaient émigré ailleurs.

Anouk sauta de son siège et regarda Michel soulever la bâche. Il sortit d'abord une pelle et se mit à dégager une grande surface. Puis de grands seaux de sable apparurent, qu'il déversa, et qu'il étala avec sa pelle. Puis ce furent successivement un parasol, des serviettes de plage, de la lotion solaire, des lunettes de soleil et enfin des coquillages de toutes sortes, de toutes tailles et de toutes les couleurs. Anouk avait l'impression d'assister à un remake de Mary Poppins avec son sac magique…

 

Il arrangea rapidement tout sur le sable, conduisit Anouk vers une serviette et lui piqua une fleur sauvage dans les cheveux.

- Bienvenue à la plage !

Elle voulut parler, amis il posa un doigt sur sa bouche.

- Écoute...Entends-tu les mouettes, et les vagues qui chantent sur la côte ?

Il respira profondément.

- Ah ! Rien ne vaut le parfum de l'océan par une si belle journée ! L'odeur de l'eau salée, le sable mouillé, et même les poissons! Tu sens le sel sur tes lèvres ?

Regarde : les bateaux de pêche! Qu'est-ce qu'ils attrapent à ton avis ? Des crevettes, des crabes, du thon ?

Encore une fois, Anouk était sans voix, refoulant des larmes... Il avait fait tout ça pour elle. Il ramena vers lui le panier de pique-nique.

- J'ai sorti des palourdes ce matin à Villemer, à côté du phare, dit-il négligemment, en ouvrant une casserole fumante.

Elle finit par retrouver sa voix:

- Mais où les as-tu trouvées ?

- Je te l'ai dit, à Villemer.

Il sourit malicieusement.

Ils passèrent l'après-midi sur "la plage", alors qu'il lui décrivait joyeusement les détails de leur côte et de leur océan. Ils mangèrent les palourdes et de la pastèque, le tout arrosé de bière. Alors que l'ombre éteignait lentement la plage, ils emballèrent tout, à regret, sauf le sable et les traces de leurs pas...

 

***

 

Ses pensées revinrent vers la salade aux œufs ; elle essuya une larme sur sa joue.

Une fine pluie tombait à présent, et les coins-coins furieux de Philomène, l'oie, lui rappelèrent qu'elle devait donner à manger aux animaux. Pour l'instant, ils attendraient.

Elle plaça la salade aux oeufs et des fruits sur un plateau, avec des fleurs des champs dans un petit vase.

En montant l'escalier, elle se dit que les souvenirs aident à traverser le malheur, maintenant que Michel ne connaissait plus son nom, et ne savait même plus qui il était. Elle haïssait la maladie qui lui avait volé sa mémoire, et détruit sa vie à elle.

Pendant qu'il mangeait, elle lui parla de cette journée à la plage... Elle le regardait, attendant une réponse, un sourire, un signe, n'importe quoi qui ressemblât au Michel qu'elle aimait toujours.

Son silence lui donna la réponse : elle sut qu'il lui revenait de garder l'amour et de conserver les souvenirs.

Pour eux deux.

 

Hervé Baudouy

 

forgetmenot

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Commentaires
H
B'jour itou, Slvie !<br /> <br /> RV
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S
J'aime aussi...<br /> Boujou Hervé !
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A
...la manière de traiter cette histoire...0O :-)<br /> <br /> BONSOIR!!!A demain...
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A
...ce sont quelques'Forget me not'...comprenne qui pourra...choisie par RV et moi, comme un seul homme, si j'ose dire!!!
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