Un drôle de turbin!!!...Oulipomiette...

26 janvier 2011

Un drôle de turbin!!!...Oulipomiette...

Je fais un boulot inhumain depuis une éternité : je suis ange gardien, avec deux trucs en plume collés gracieusement derrière mon dos. Ange Zizi, c'est mon sobriquet !

Je dors le soir dans un nuage, au clair de la lune, et je descends comme un delta-plane le matin, pour bosser ici ou là sur la terre, selon les missions imposées par mon contremaître, le pas baisant ange Gabriel. Il annonce à chacun le lieu et la formule de sa journée. Annoncer, il aime ça depuis deux mille ans ! Ça me fait marrer !

Mère Térésa a eu un ange gardien et Lady Gaga aussi, Voltaire et Sartre aussi, mais Landru et Hitler ont laissé les leurs exténués et hors d'usage !

Je reste donc très modeste, mais je guigne en douce « La Sacrée Plume » qui sera décernée au plus balèze d'entre nous à La Saint Glin Glin.

Mon rôle consiste à protéger un être humain, calmement ; à maintenir ses désirs à un niveau compatible avec les lois de son pays. Je reste aimable et concentré, équilibré, efficace selon une méthode infaillible que d'autres ont mise au point avant moi. Au début tout le monde s'est foutu de leur gueule, et maintenant l'Angélisme est fameux et pratiqué partout.

Moi, je l'ai adopté à donf !

Etre le meilleur ange de l'année est un rôle qui exige un bon QI. Il me faut, en plus, deux heures de vol le matin, et autant le soir : ça demande une bonne hygiène de vie. Même à côté de deux anges plus jeunes que moi, avec des ailes dernier modèle, je vole plus vite et plus longtemps.

J'exerce une surveillance ferme et bienveillante sur mon protégé : ou bien je l'empêche de casser la gueule à son voisin qui laisse la sono à fond à trois heures du matin pour écouter Léo Ferré, ou bien je l'empêche de dépenser l'argent du ménage en Champagne millésimé pour des putes de bas étage. Je fais ça plusieurs fois par semaine. Quelquefois je garde un silence inattendu pour le surprendre et il dit : « un ange passe ».

Ne pas oublier les petits coups de main à droite et à gauche : l'aider à trouver deux chaussettes de la même paire le matin, et de la même couleur... ne pas oublier d'aller chercher le gosse à quatre heure et demie à l'école, rapporter la baguette de pain pour le déjeuner...

Tout est important dans ma carrière.

L'essentiel est de garder une bonne mentalité. Aider un homme avec un minimum de bonté et d'indulgence. Ne pas le mépriser pour ses imperfections, ne pas faire semblant de ne pas l'entendre quand il m'appelle, et surtout… même en colère... ne pas l'envoyer au Diable.

Je protège jour et nuit et je garde mes ailes à portée de main sur mon nuage de chevet quand je dors.

C'est notre Sainte Règle. Nous la suivons jusqu'à l'âge de la retraite et là, commence notre vrai repos. On fout les plumes à la poubelle et plus rien n'a d'importance. A l'intendance, on nous remet un jean, un ceinturon, et des baskets. Une casquette. Nous coupons nos cheveux bouclés. Un peu de gel coiffant raidit joliment les mèches restantes, modèle hérisson... et c'est parti, mon Zizi ! Enfin libres ! À nous les femmes qui fument et qui pètent dans la soie.