L'Humour-Fiction d'Hervé Baudouy fait ma joie!...voici:'BOB !'...

D'aucuns prétendent que Bob le Mystique n'a jamais existé.

Bien sûr que si !

Nous connaissons son Numéro Assurance Sociale, nous avons son permis de conduire, sa cravate spéciale bleue avec les canards roses imprimés dessus, et son célèbre barbecue muni du lance-flammes optionnel.

Bob le Mystique fut une personne réelle, qui alla à l'école comme vous et moi. Il jouait au foot avec ses amis, il prit des leçons de piccolo, il eut les oreillons, la varicelle et la goutte au nez.

Il grandit à Rien-sur-Néant, entre Montréal et Québec, petite localité fort calme, sauf le samedi soir à la Brasserie.

Il termina ses études avec un diplôme en conception de "cubes" pour bureaux d'affaires, à l'Université de Schpontz-les-Trolleurs.

Ce fut un triste jour, à Rien-sur-Néant, celui où Bob le Mystique, le fils chéri du village partit pour la grand'ville  (Nom de d'là !).

Mais partir il devait !

Aussi il chercha un emploi dans cette ville corrompue et inique, Drive-In (and try to Drive Out!), non loin de Sodome et Gomohrre.

Bob le Mystique devint bientôt un homme important à Drive-In; il organisa les "cubes" de bureaux d'une grosse compagnie, s'assurant que chaque employé avait trois mètres carrés pour travailler.

Pas facile. Mais Bob était souvent qualifié de "Bobstiné"...

Il rencontra et épousa Annie Laisse-Béthon, une beauté incendiaire et volontaire de  Phloutz-Garlentz-Pot-au-Lait, siège des Laiteries Paix-Reth , dont le patron s'appelait Butler...

Elle était fille du Pompier Bonoeil (tout le monde ne peut pas épouser la fille du Bédouin !)

Bientôt comme vous et moi, ils eurent deux enfants et demi, une maison, une hypothèque ; ils allèrent à des pique-niques, des matches de foot, des barbecues, des réunions

parents-professeurs, des batailles de  brocoli, bref ils eurent une vie normale.

Tout comme vous et moi aussi, ils creusèrent des trous autour de leur maison, et y déversèrent des quantités de graines. Cela s'appelle du jardinage, au cas où vous ne le saviez pas...

Puis il advint, un jour d'avril que Fer-Blantier, le dieu du papier aluminium, envoya la foudre à travers les cieux. Elle frappa Bob à la tête et l'assomma.

Quand il ouvrit les yeux, ATTENTION ! , il vit une arche d'or et un passage derrière cette dernière.

Bien sûr, vous et moi serions bouleversés d'avoir été atteints par la foudre et de nous réveiller devant l'épicerie de la Mère Luche.

Bob fut bouleversé, c'est vrai.

Mais, en vérité je vous le dis ! , il réalisa rapidement que ce n'était pas une épicerie. En fait, c'était une ouverture vers l'AUTRE MONDE !

Vous et moi serions rentrés chez nous à toute allure, pour nous taper un double... non, un triple scotch, et bien tassé !

Bob, non !

Il sut tout de suite que quelque chose d'extraordinaire venait de lui arriver.

Il se ressaisit et se mit à suivre le passage vers l'AUTRE MONDE...

Et que pensez-vous qu'il arriva?

Fut-il dévoré par les girafes-requins?

Fut-il mis en pièces par des hamsters ?

Non !

Au moment où il mit les pieds  dans l'AUTRE MONDE, il rencontra

Fer-Blantier, le dieu du papier alu, Pam Peurs, la déesse des couches, Mec Anneau, le dieu des modèles réduits, et tous les habitants du  monde au-delà de notre monde.

Bob le Mystique avait pénétré dans le Val-qui-Rit, où nous irons tous un

jour… peut-être, juste après la marina, quand nous quitterons cette vallée de larmes.

Mais tous n'y partiront pas !

La Fédération des Installateurs Honnêtes de Derricks et le Portier Fou ne laissent passer que ceux qui le méritent. Et croyez-moi, ils savent qui le mérite ou non. Leur système de surveillance est aussi bon que celui du Père Noël.

Je suis sûr que vous voulez être honnête, tout comme moi. Tout le monde veut l'être et pénétrer au Val-Qui-Rit.

Mais jusqu'à ce que Bob ait eu le courage de s'aventurer dans l'AUTRE MONDE et d'en ramener le "Manuel pour Bien Se Conduire, pour les Nuls", personne ne savait exactement ce qu'il fallait faire.

Nous savons tous que Louis, le représentant en rutabagas, recopia certaines instructions venues des dieux sur une tablette de pierre qu'il avait empruntée à son copain Moise, avec une plume bien taillée, il y a fort longtemps, avant les disques durs. Mais Louis était distrait, et un jour, il oublia la tablette dans sa chemise, et mit la chemise au lavage. La tablette  ressortit très propre, mais certains mots furent effacés,  et le reste fut très difficile à comprendre.

Par exemple, au verset 2, il est dit :"Tu enduiras le canard avec du chocolat" , et au verset 3 :"Tu ne colleras pas de plumes dans le dos de ton voisin, ni ne peindras sa femme en rose. »

Comme vous le constatez, cela n'a pas beaucoup de sens,  et ne donne pas beaucoup d'indications sur la manière de vivre. De nombreux chercheurs et forgerons ont voué leur vie à la découverte du sens de ces mots, et ils ont de grands débats avec ceux qui contestent leurs théories.

Bob le Mystique a mis fin à tous ces débats, car les dieux lui avaient parlé en des termes que les simples mortels pouvaient comprendre.

Vous imaginez combien Bob a dû être effrayé, surtout quand Bill, le dieu de tous les dieux, lui parla.

Oui, en vérité, Bill l'Abomiffreux, le puissant,  qui mena la révolte contre les Géants-Pas-Beaux, des siècles auparavant, celui qui conquit le Val-Qui-Rit , mit un terme à l'Ère Glaciaire, et nous transmit le secret du brocoli.

Ce fut Bill L'Abomiffreux qui donna à Bob le Manuel qui explique de manière claire comment se comporter.

***

... Et il advint que Bob ressortit du Val-Qui-Rit et se retrouva sur un tapis persan, devant la table à café du salon de sa maison coloniale, avenue des Banquiers Nécessiteux.

Étant un homme volontaire, il se rendit compte immédiatement qu'il se passait quelque chose.

Son costume en arête de hareng, en soie et laine mélangée  (laver à l'eau tiède) avait disparu !

A sa place : une serpillière !

Sa Rollex avait été remplacée par un pieu, du genre utilisé par les bergers pour mater les moutons mutinés du Mounty.

Ses dreadlocks avaient disparu aussi.

Vous croiriez que Bob fila chez le coiffeur ?

Pas Bob !

Il savait que c'était un Signe de Bill l'Abomiffreux, un rappel de sa nouvelle mission dans la vie.

Sa femme, elle, ne savait rien de cette mission assignée par les dieux.

Elle en fut vexée.

D'abord elle pensa qu'un démon s'était introduit chez elle, avait avalé Bob, puis s'était affalé sur le tapis persan, après avoir peut-être sacrifié une vierge sur la table à café.

Puis elle vit le tatouage sur la serpillière, et sut sans l'ombre d'un doute que c'était son mari : qui d'autre pourrait avoir le tatouage d'un moucheron écrasé avec, écrit à côté :"Arrrgh!"

"Ach !" s'écria-elle polyglottement. "Achtung ! Qu'est-il arrivé à mon époux laid, que son costume ait disparu, remplacé par cette mocheté dégoulinante? Et d'où te vient ta calvitie, mon tendre aimé ? Et tu ferais mieux d'avoir une bonne explication !"

De telles contingences ne préoccupaient plus Bob.

- De telles contingences ne me préoccupent  plus, ma chérie, dit-il.

J'ai simplement capté un nouveau canal que personne n'a, même pas sur le câble. Je reçois mes instruction directement de Bill l'Abomiffreux, le dieu de tous les dieux. Il veut que j'aide les gens à bien se comporter.

Entendant cela, sa femme fut remplie d'allégresse  (mais pas d'allcéllulite)

- Ha Ha ! dit-elle, et elle invoqua le Démon Avocat et le Démon Psychiatre, pour tenter et

dominer Bill, de son vrai nom Trompe-Rit (frère jumeau du dieu des éléphants roses)

Alors le Démon Psychiatre montra à Bob des choses que vous et moi trouverions tentantes :

Un téléphone cellulaire avec accès Internet  et ascenseur lyophilisé, un bon laptop-sèche-cheveux rotatif et un complexe de jeux digne de Las Vegas.

Bob considéra ces choses et ne fut pas tenté :"A quoi bon ces choses ! Il m'a été accordé un canal que personne n'a, pas même sur le câble"

- Tu es déprimé, dit le Démon Psychiatre. J'exorciserai ta dépression avec du chocolat.

- Oui, j'en suis content : je n'ai pas de diabète.

- Tu souffres d'illusionite aiguë. Je la soignerai !

- Je n'ai pas besoin de médicament.

Le Démon Psychiatre vit qu'il n'avait aucune influence, et se retira à Schnauzer-la Grande, un endroit horrible, empli de publicités d'automobiles et de musique pour ascenseurs de grands magasins.

Alors le Démon Avocat parla :

- Si tu ne te repens pas du fait que tu gagnes moins que tes voisins, je te séparerai d'Annie Laisse-Béthon,  et te rejetterai dans les Ténèbres Extérieures Très Froides , et sans

Jacuzzi !

- Ha ! Ha ! Qu'il en soit ainsi, dit Bob.

Il ricana en prenant la position du lotus inversé, sur la tête avec les jambes croisées.

Et il médita...

Ses méditations le menèrent sur les chemins de la connaissance improbable et de la certitude floue qui, comme chacun sait, sont les deux mamelles du bonheur :

Il écrivit à la diable ces quelques phrases que des disciples, plus tard, éxégèteraient interminablement, dans des volumes de gloses interminables et mal indexées :

« Rien n'use davantage la robe d'une femme que le regard d'une autre femme.

« Qu'est-ce que le vent ?

- C'est de l'air qui est pressé... »

« Il n'y a pas besoin d'espérer pour que le contraire se produise. »

« L'esclavage est l'avenir devenu visible. »

« Le sommeil de l'horreur engendre l'espoir, et le gendre de l'Horrible espère le sommeil. «

« L'Avenir sans Mystère n'est rien, le Mystère sans Avenir ne vaut guère mieux, et le Présent n'est pas un cadeau...»

Mais au bout de  quarante jours, vers quatre heures de l'après-midi, il eut faim...

Il se souvint que sa femme cuisinait un succulent poulet aux hormones, au curry et au four.

Il la rejoignit dans la cuisine. D’une main, elle tournait le riz, de l’autre elle effeuillait la marguerite avec l’avocat, lequel lui décrivait longuement et de manière très romantique ses estampes japonaises…

- O Tempora, O Mores, s’écria-t-il, outré jusqu’aux tréfonds de l’épigastre, le riz va coller !

Et, désespéré, il prit son pagne, sa brosse à dents et son portable à décollage vertical :

- Adieu, monde cruel, je m’en vais rejoindre Bill l'Abomiffreux, là-haut sur la montagne !

Et on ne le revit plus, même pas sur la montagne !

Hervé Baudouy

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[aglaé]

De Takatshi...