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VITDITS ET AGLAMIETTES
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Vous venez d'atterrir sur le blog d'AGLAMIETTES où sévissent Aglaé, Thomas et Dan.

Chez nous, vous trouverez des textes courts, des aphorismes pas toujours très sérieux, des réparties dites VD, ou « Vitdit » pas vraiment classiques, mais, autant que possible humoristiques.

Laissez-nous un commentaire si vous avez le temps et l'envie.

Les commentaires sont accessibles sous chaque post de nos auteurs.

Une réponse vous sera adressée (sauf caprices de l'informatique toujours possible) !

vitdits-ecran

Participez sous la rubrique : « Le Plumard » réservée à nos amis et invités.

A bientôt !

13 janvier 2011

Où l'on prend conscience des débordements de La Hurette! Qui l'eût cru ?...

Quand_Normandie_rime_avec_pluie

LES 10 PLUIES DE NORMANDIE

 

Vous avez tous entendu parler des 10 plaies d’Egypte, mais connaissez-

vous les 10 plaies de Normandie ? Ou tout du moins devrais-je dire les

10 pluies de Normandie !

Ecoutez le pénétrant témoignage d’Ermann Ormand, qui endura jour après

jour et simultanément une plaie après l’autre et finit par périr d’un

accès fulgurant de potomanie au crépuscule de son récit. En voici le

contenu, retrouvé par miracle hermétiquement encapsulé dans une

bouteille d’eau minérale, échouée sur une plage du débarquement.

 

« La Normandie, ce beau pays qui m’a pourri la vie… Mais avant

d’entrer dans le vif du sujet, un petit rappel géographique : comme

son nom l’indique, ma Normandie se situe non seulement au Nord, mais

aussi à l’Ouest, ce qui lui permet de jouir à la fois des cochonneries

de Bretagne et des perturbations de Grande-Bretagne. Ici, pas de

répit : après la pluie, le mauvais temps et pas d’espoir de lumière au

bout du tunnel. Impossible de fuir ce funeste destin de mouillette et

d’échapper aux diverses patheaulogies qui l’accompagnent : goutte,

sale cataractère ou dépression en cascade.

Mais voyons plus en détail ces 10 pluies et leur cortège de plaies

collatérales.

 

1. Je naquis un jour de déluge à Biville-La-Baignarde, petite commune

bien arrosée du Pays de Caux. Ma mère, gonflée comme une outre, se mit

soudain à glouglouter et perdit les eaux entre averse et

précipitation. Etait-ce un signe du destin si j’héritais de celui –

zodiacal - du poisson ? Toujours est-il que je me retrouvais équipé de

doigts palmés, à la grande stupéfaction de mes parents qui mirent

cette particularité sur le compte d’une mutation génétique : par chez

nous la pluie dure, drue et persistante, imperturbable et diluvienne ;

il pleut des cordes ou comme vache qui pisse, il tombe de l’eau, il

flotte ou bien il vase. La première chose que l’on m’apprit tout

bézot, avant de me jeter avec l’eau du bain : « Tais-toi et nage ».

Mais qu’avons-nous fait à Zeus, dieu de la pluie, pour qu’il rassemble

ainsi les nuages sur nos têtes ? Quel péché sulfureux avons-nous

commis pour mériter telle pénitence ? Souffrerait-il d’incontinence

chronique quand il survole notre région, véritable pot de chambre ?

Ici, seules les grenouilles sont à la fête. Et aussi les limaces, que

ma grand-mère faisait macérer dans l’eau de vie pour concocter un

sirop contre le mal de gorge.

 

2. Le crachin arrosa le jour de mon baptême. Il crachinait ainsi

depuis quarante jours et quarante nuits, impitoyablement. Mon père,

qui n’était pas né de la dernière pluie et souffrait de trouble

eaubsessionnel compulsif, se chargeait de construire un sous-marin

dans la cave, tandis que le curé, d’humeur suintante et fortement

imbibé, faillit me noyer dans le bénitier qui débordait. J’en conçus

une aversion phobique pour tout milieu aqueux et priais le ciel de

m’accorder le pouvoir magique de marcher sur les eaux. Malgré mon

jeune âge, j’attrapais la spongioarthrite crachineuse. D’une capacité

couvrante exceptionnelle et doté d’une force de persuasion

incontournable, le crachin transperce corps et coeurs jusqu’à

extinction totale de la moindre étincelle. Sournois et sadique, mine

de rien, il va vous ronger le plus brave des crainpaleau jusqu’à l’os.

Pénétrant, il vous détrempe le ciboulot en un rien de mauvais temps et

après lui le déluge.

 

3. La grisaille baigna mon enfance. A l’école primaire, on nous

enseigna pourquoi nos ancêtres, qui pourtant n’étaient pas des poules

mouillées, craignaient que le ciel leur tombe sur la tête. Pas

étonnant avec ce couvercle permanent qui plane sur nos ciboulots et

nous plonge dans la pénombre perpétuelle. Ici, tous les chats sont

gris, la Seine est gris bleu et la mer vert de gris. À force de nager

constamment entre deux eaux, ma mère plongea dans la mélancolie et se

répandit en lamentations, pleurant sur son sort de pauvre moisie ;

elle racontait partout des histoires d’eau croupie à vous tirer des

larmes de Jeanne d’Arc. Cette débâcle n’arrangea pas l’équilibre

familial déjà houleux. Je fus alors assailli de symptômes peu

ragoûtants qui sourdent intérieurement comme l’énurésie ou autre flux

de ventre, tellement imbibé que j’en vins en dernier recours à boire

de l’antirouille en guise de remède contre les gargouillis.

Pour sûr, celui qui inventerait le soleil en bouteille ferait fortune

en Normandie !

 

4. D’une intelligence limitée par l’horizon bouché, je n’arrivai pas à

obtenir mon diplôme de plombier, malgré des heures d’études à tenter

de résoudre des problèmes de robinets. Mon sommeil était traversé de

cauchemars de baignoires qui n’en finissent plus de fuir et d’hydres

tentaculaires qui m’engloutissaient dans l’abîme des profondeurs. En

bref je pédalais dans la gadoue et j’en avais plein les bottes.

Impossible d’échapper à cette bouillasse existentielle ! On la ramène

à la maison collée aux semelles et paf ! on se prend une bonne trempe

pour la peine. La boue laisse des traces sombres sur les vêtements

clairs et des traces claires sur les vêtements sombres, hantise de la

ménagère la plus endurcie. Elle est aussi la cause de dérapages

incontrôlés, de glissades au fond du précipice, d’effondrements de

terrains et de moral, d’où la célèbre expression de « trou normand ».

Ici, le calva coule à flots, il faut bien se consoler avec les pommes

qu’on a, faute de bol !

Et pour lutter conte le syndrome soupaulait des habitants de Seine-

Maritime, le Conseil général – qui nous a affublés du joli nom de «

Seinomarins », a adopté cette devise d’un goût vaseux :

« Pluie du matin n’arrête pas le Seinomarin ».

 

5. Pour résister à l’humidité ambiante, je me réfugiais souvent au

troquet troglodyte du coin « Chez Mimile Sabord ». C’est là que je

rencontrai ma future ex-femme, Ondine : une vraie sirène, nageuse de

compétition et dotée d’une fontaine miraculeuse qui me chavira corps

et âme. Nous convolâmes par un temps éprouvantable et malgré le dicton

« mariage pluvieux, mariage heureux », notre union tourna rapidement

en eau de boudin : elle me trouvait ennuyeux comme la pluie et

s’enfuit au premier remous avec un homme grenouille, une sorte de rat

de marée. Inconsolable, je pleurais toutes les larmes de mon corps

dans la serpillière qui me servait de doudou. J’hésitai ensuite à me

reconvertir en pisciniste ou météorologue, mais fus déclaré inapte par

la médecine du travail pour cause de ramollissement méningé.

 

6. À mi-vie, je me crus enfin sauvé des eaux à l’annonce du

réchauffement climatique. Enfin une bonne nouvelle ! J’allais pouvoir

faire trempette sans grelotter dans la Manche, me dorer la blême

carcasse sur la plage ou encore me rincer la dalle aux terrasses de

cafés. Enfin, je ne serai plus obligé de me mettre à poil devant les

tomates du jardin pour les faire mûrir. Enfin, les femmes pourraient

porter des tenues légères en été sans se cailler les miches. Mais

voilà encore un paradoxe aquatique et de source sûre (issu de

scientifiques/climatologues, c’est vous dire !) : plus la planète se

réchauffe, plus la Normandie se refroidit. Ici, la canicule n’existe

pas. Pourquoi, me direz-vous ? parce que le Gulf stream. La migration

des icebergs détachés de leur mère calotte vient perturber le sens

giratoire de ce courant océanique qui tempère nos côtes. Catastrophe !

encore un espoir qui tombe à l’eau… D’ailleurs qui ne connaît pas les

fameux ciels à la Boudin, notre célèbre peintre régional qui a initié

Monet aux nénuphars ? Ces ciels représentatifs de notre décor habituel

ne donnent hélas pas envie d’y monter. Je préférais me livrer à la

débeauche, histoire de gagner mon enfer où, au moins, il fait beau et

chaud, comme dans la célèbre contrepétrie.

 

7. Le brouillard aussi me rendait paraneau. On prétend que le Normand

n’a pas inventé l’eau chaude, mais comment voulez-vous découvrir quoi

que ce soit sans visibilité et avec un cerveau embrumé ? Comment avoir

le sens de l’orientation quand on n’a pas de points de repères ?

Comment se distinguer quand on passe inaperçu ? Je me sentais comme

une sorte d’ectoplasme qui se dissout dans le décor. La confusion me

grignotait à petit feu, vu que je n’y voyais plus goutte et ne

reconnaissait même pas mon chemin pour rentrer à la maison. Le manque

de lumière me détraqua la photosynthèse et me priva de toutes ces

bonnes vitamines dont le Sud regorge ; résultat : un teint d’endive,

une mine de navet, des poches sous les yeux larmoyants et une odeur

tenace de moisi, ce qui, vous l’admettrez, n’incitait pas les naïades

à me tuyauter.

 

8. La tempête de l’an 2000 fut la goutte qui fit déborder le vase. Je

ne surnageai pas à la rupture de canalisations qui engloutit ma

modeste demeure, malgré les fortifications amphibies érigées suivant

la méthode du castor junior. Je sombrais dans une dépression abyssale

diagnostiquée comme hydrophobie par le médecin spécialiste en maladies

subtreaupicales. J’entamai alors une thérapie incertaine qui

consistait à chasser les angoisses en répétant à chaque intempérie

psychique : « Je suis un canard étanche, je ne me noie pas dans un

verre d’eau », et en dormant dans un lit bateau, sanglé dans un gilet

de sauvetage. Je suivis un régime sec à base d’aliments déshydratés et

de boissons en poudre, fréquentai les cabines à U.V. et subis une cure

de désinteauxication à Amélie-Les-Bains. C’est là qu’on nous apprit

une méthode comportementaliste forte utile : tirer la chasse d’eau

pour vider le trop plein mental.

 

9. « Sale quart d’heure, les mouches pètent », disait mon petit frère

Marceau quand la météo tournait à l’orage. Eau rage, eau désespoir !

C’est lors d’une expédition de pêche aux bulots que je fus

sournoisement frappé par la foudre. Un électrochoc jaillit de mes

pieds palmés et, en pleine lévitation, je crus un instant que mon vœu

de marcher sur les eaux était exaucé… Puis plus rien. Quand je me

réveillai, tout était blanc, sec, chaud, calme, lumineux et inconnu.

Avais-je enfin atteint le paradis ? Ou bien avais-je été téléporté

ailleurs, dans une contrée plus potable ? Un homme en blanc s’approcha

de moi et m’expliqua que j’avais réchappé de peu à l’hydrocution, et

qu’il fallait attendre quelques jours que je dégonfle avant de se

prononcer sur les éventuelles séquelles à marée basse.

 

10. Je n’attendis pas la décrue et décidai de me jeter à l’eau. Une

nuit de grain, je pris la poudre d’escampette et décidai de partir

vers le Sud. Il me suffisait de grimper dans le sous-marin à pédales

fabriqué par mon père et de me laisser porter par le courant. Ensuite,

ça coule de source, suivre la côte vers le bas. Si j’avais perdu le

Nord, au moins il me restait ma boussole. Adieu, ma Normandie ! Une

seule certitude me baigne : jamais je n’irai te revoir…

 

À ce jour, Ermann Ormand a totalement disparu de la circulation. Nul

ne sait s’il réussit à satisfaire sa tentation d’une île, s’il périt

englouti par un tsunami ou bien dévoré par un monstre pélagique. Quoi

qu’il en fût, qu’il repeause en paix…

 

——

Sylvie Huret


 

 

 

 

 

 

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Commentaires
A
...tu me fais rire...T'as un côté potache dans ton humour...Douze ans et demie!!!
Répondre
H
J'adore !!!<br /> <br /> RV
Répondre
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