JEAN BARBééééé...'Espoir Rouge'
Espoir rouge
Un remorqueur halait d'une barge rouillée
D'où pendaient bruns et mous des cordons de varech
Il laissait sur l'eau verte en veinures de teck
Des parfums d'industrie, de poissons boucanés ;
Des goélands dorés l'escortaient en lâchant
Tantôt des cris de guerre et tantôt des fientes;
Charognards, ailes d'ange et prunelles ardentes
Guettant la moindre mort. Il flottait au doux vent.
Des nuages de bronze étouffaient l'horizon,
Le jour n'était pas nuit mais il n'était plus jour,
Sous les fanaux du quai s'allumant tour à tour,
Les putains recoiffées reprenaient leur faction.
Sortant d'un bistrot noir exhalant des fritures,
Expirant des flonflons, exhibant des bouteilles,
Trois matelots pliés le pompon sur l'oreille,
bras dessus – bras dessous, entonnaient des ordures ;
les autos descendaient du vieux bac une à une
Et montait aussitôt la rue Thiers vers la ville,
On treuillait des colis, des fûts de bois des îles,
La cheminée du bord fumaillait sous la lune
Mais là-bas sur le pont jaune au débarcadère,
Comme coquelicots dans un fossé en Juin,
Ton bonnet amarante et ta jupe carmin
Saignaient d'un rouge espoir le port où meurt la mer.