Natalie Dessay...une répétition qui m'a touchée...
Il y a quelques temps, j’ai regardé sur la chaîne Mezzo un documentaire et une interview de Natalie Dessay, soprano d’une classe internationale, quarante ans environ, mariée, deux enfants.
Elle ne se présente pas du tout comme les « Diva » de ma jeunesse….Physiquement, c’est un petit format, ni grande, ni grosse, une petite poitrine…on dirait une adolescente presque androgyne…..jolie sans plus, brune, mais deux yeux noirs un peu ronds qui brillent d’une intelligence singulière…
Nous la voyons d'abord chez elle chez elle… superbe maison hollywoodienne… décoiffée, en jean et marcel, les pieds dans des babouches… auprès de son accompagnateur, la seule personne que nous verrons ce soir à part les deux enfants et les chanteurs de la troupe. Elle travaille devant nous un air de « Manon », repris dix fois, les bras menus exprimant par leurs gestes les élans de la voix vers les notes hautes….le piano accompagne dix fois lui aussi, avec la même précision, la vocalise jusqu’à l’entière satisfaction du soprano bouleversant….sans orchestre, sans décor, sans costume,…une voix seulement, mais sublime. ; Elle arrête la leçon soudain, presque brusquement, et s’éloigne, légère, de son répétiteur en riant et en fredonnant une chanson d’Aznavour….je suis interloquée par ce mélange de talent, de simplicité qui marquera toute l' émission…les deux enfants sont là comme ils seront là plus tard dans les coulisses du théâtre, grignotant des biscuits…Leur mère dira :’j’aime qu’ils soient là autour de moi pour qu’ils comprennent mieux à quel point ma vie est singulière et pourquoi je pars souvent à l’autre bout du monde, les laissant à leur père »
Sa voix enregistrée accompagne les mouvements de caméra dans son jardin d’une élégance parfaite, végétation entre gris et blanc autour d’un plan d’eau qui lèche les deux ou trois marches devant un vaste salon…
Nous sommes ensuite à l’Opéra et notre petite bonne femme, habillée des lourds vêtements de son rôle, transformée par un maquillage très savant, illuminée des bijoux habituels de théâtre qui sont faux mais plus beaux que des vrais, rehaussée de chaussures à talons qu’on devine sous la robe surbrodée, notre petite bonne femme, transfigurée, entre en scène. Nous n’entendrons que l’air final de « Manon » et les applaudissements du public…
Quand elle salue au milieu de ses camarades on est étonné de la retrouver si petite, si modeste, au milieu des ors et des lumières ;
J’aime la dernière question qu’on lui pose. Est ce que tous les compliments qu’on vous faits ont de l’importance pour vous. Elle dit simplement que c’est un plaisir mais que, en même temps, ça n’a aucune importance pour son travail…Chaque soir, moi seule, je sais ce que je veux arriver à faire…..ce que j’ai réussi à faire…ce que je n’ai pas réussi….tous les jours il faut recommencer, espérer que ce sera parfait….et savoir que ce n’est jamais parfait.
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