Le voyage à pied de Jean-Luc Clémençon

Voyage à pied

Jean luc Clémençon

Les premiers pas. Le quartier. Les amis qui nous accompagnent : Babeth, François, Pascale. On ne regarde pas comme d'habitude. On voit loin mais sans savoir où. On marche sur une route mille fois empruntée au quotidien mais ça n'est plus la même car elle va au-delà de la ville, des environs, de la région : la route de notre quartier nous porte vers Lisbonne, et ça change tout. On ne retourne pas au boulot le lendemain, on continue... un jour, deux jours, une semaine, un mois, six mois, et du coup, on ne voit plus rien de la même façon.

Même les passants entrent dans le jeu. Ils ont lu l'article du quotidien régional qui raconte notre projet. Un petit vieux nous interpelle :

- Vous allez prendre le chemin royal qui va vers Orléans et la route de Jeanne d'Arc par Vaucouleur ! bonne route jusqu'à Compostelle !...

Évidemment on ne nous interpelle jamais de cette façon lorsqu'on marche en ville d'habitude. Aujourd'hui tout est différent. On marche en regardant les coquilles stylisées collées sur les réverbères. La place de Toul n'est plus l'endroit où je viens acheter mon pain et le journal mais le chemin emprunté par des milliers de personnes depuis des centaines d'années pour se rendre à Compostelle.

Du coup le temps s'invite au voyage. Nous nous sommes souvent baladés à pied le weekend en Lorraine, mais le début de ce voyage va devenir en même temps une balade dans le temps, et l'espace va s'en trouver plus vaste. C'est difficile à décrire ce truc : Je crois que le voyage à pied permet d'arpenter toutes les dimensions... Le fil de l'histoire, le fil des saisons, les gens qui passent, les bruits, les odeurs...

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Notre voyage comporte deux parties : les 12 premiers kilomètres parcourus avec nos amis, et les 3142 suivants. Avec Babeth, Pascale et François nous avons un objectif : marcher jusqu'au Saint-Claude.

Ce tilleul tricentenaire protège les habitants de la petite commune de Choloy-Ménillot de la foudre et des mauvais sort grâce à un toute petite statue du vieux Claude qui a élu domicile à l'intérieur du tronc. C'est l'endroit que nous avons choisi pour notre premier pique-nique, royalement pourvu par pascale et Babeth. Le soleil qui s'était montré à Toul au moment du départ à presque disparu. Nous nous sommes étalés sur un tapis de feuilles sèches. C'est encore l'hiver. Comme j'ai fait le vœu de réaliser un dessin chaque jour je sors mon papier et mes crayons pour réaliser un petit portrait de l'arbre remarquable tout en me goinfrant de cake salé.

Vient le moment de se quitter. Nos amis redescendent vers le village et nous nous enfonçons dans la forêt sur ce chemin qui n'est autre que l'ancienne route romaine Orléans-Vaucouleurs -Toul.

Nos regards cherchent constamment les petites flèches jaunes qui ne nous quitteront presque plus jusque Lisbonne. C'est comme un jeu et un truc un peu magique, ce fil pas toujours très visible qui va nous faire traverser des forêts, des champs, des villages, des régions parfaitement inconnues avec la certitude de ne jamais nous tromper. C'est un peu comme être invité dans un endroit très spécial, un autre monde presque superposé au monde habituel mais en léger décalage tout de même, et puis la nature est notre principal interlocuteur ; les oiseaux, le vent, les arbres, les cornouillers mâles en particulier puisque ce sont pour l'instant les seuls arbustes à colorer le paysage en jaune

Nous sommes arrivés à Chalaine où nous avons été accueillis par Michèle, Jean et leur petit-fils. Nous avons parlé de souffleurs de verre, de Maroc, de contes et d'aquarelles, ravis de se découvrir autant de centres d'intérêt.

Un voyage à pied vers Compostelle c'est une immersion dans la nature, un très grand jeu de piste, une ballade dans le temps, ce sont aussi les rencontres, comme un voyage à travers les gens.

Au fil des jours une idée s'est imposée à nous : toutes ces personnes croisées sur le chemin, qui nous accueillent dans leur maison ou chez qui nous installons notre campement, nous allons leur demander de nous écrire ; écrire leur présence sur ce chemin, comment ils ont vécu notre rencontre, le petit bout d'eux-même qu'ils voudraient nous laisser...

Et peut-être qu'à notre retour nous serons capables de rendre compte de tout cela...

A suivre...

Comments

[agla]

Jean Luc!

Que c'est bon de vous trouver là!!!!

Et ça ne fait que commencer...