Marlène Tissot vraie et forte comme toujours...
When I’m sixty four
Il me parle de ses élèves, les autres, et je me demande s’il me regarde simplement comme une élève ou s’il parvient à m’imaginer autrement, à m’imaginer nue dans son lit. Il me parle de choses et d’autres, la météo, la politique, la couleur étrange des yeux de son chat, les horaires de bus, les affiches de cinéma. Il me parle comme s’il tentait de construire un mur de mots entre lui et moi. Les mots, même épais, ne me font pas peur. Ils se traversent d’un battement de paupière.
Il se tait quelques instants, balaye le paysage du regard, la rue, les passants, les platanes, les oiseaux, nos tasses de café sur la petite table en faux marbre. Il sourit au serveur puis glisse précautionneusement ses yeux dans les miens en prenant soin d’effacer son sourire. Il me dit « Quand j’aurais soixante quatre ans, tu en auras à peine trente. », comme on prévient un enfant, en espérant le décourager, qu’il aura mal au ventre s’il mange trop de bonbons. Je hausse les épaules parce qu’il est tout à fait possible qu’il n’atteigne jamais soixante quatre ans ni moi trente. Parce qu’il est tout à fait possible qu’il se passe quelque chose entre nous. [Life is a Beatles song #9]
Marlène Tissot